Anthologie sous la direction de Marie-Andrée Beaudet, Mylène Bédard et Claudia Raby, avec la collaboration de Juliette Bernatchez

Pour se détravestir culturellement, retrouver leur propre réalité, se déconnecter des mythologies dissolvantes et répressives qui les ont encagées jusqu’ici, se dépouiller des oripeaux dont les avait affublées depuis des millénaires le discours phallocentrique, les femmes doivent, dans bien des secteurs des sciences humaines, tout reprendre à zéro pour départager l’acceptable de l’inacceptable, contester souvent des postulats fondamentaux du savoir et parfois la logique même qui les conditionne. (« La femme comme non-sujet dans les sciences dites humaines »)

Cette anthologie veut combler une lacune qui explique peut-être que la figure de Jeanne Lapointe se soit quelque peu effacée au fil des années : elle vise à assembler ses textes disséminés dans de nombreux périodiques ou collectifs et qui n’ont jamais été réunis en monographie. Pour la première fois, les lecteurs et lectrices pourront lire un ensemble de ses écrits les plus intéressants, lesquels confirment l’actualité et la pertinence de son propos, ainsi que la richesse de sa contribution à la modernisation et à l’émancipation de la société québécoise.

Le parcours de Jeanne Lapointe (1915-2006) est en effet exemplaire. Elle est la première laïque à obtenir une licence ès lettres et une maîtrise ès arts de l’Université Laval (1938), la première femme couronnée par la médaille d’or du français décernée par le Consulat de France à Québec (1938), la première professeure de littérature de l’Université Laval (1940) et la première universitaire à signer des critiques littéraires dans la revue d’idées Cité libre (1954). Elle a contribué à l’enseignement d’œuvres et d’approches nouvelles, qu’il s’agisse du Nouveau Roman ou de l’analyse psychanalytique et féministe des textes. Elle a également joué le rôle de conseillère auprès d’écrivaines majeures du Québec contemporain comme Gabrielle Roy et Marie-Claire Blais.

Rebelle et volontaire participe sans aucun doute au renouvellement et au décloisonnement de l’histoire littéraire et intellectuelle du Québec, de plus en plus encline à rappeler la carrière de femmes de lettres d’exception comme Jeanne Lapointe.